Rédemption

Il y a de ces jours où ne l’ont voudrait pas être dérangé par ses souvenirs. Il y a de ces moments où il ne faut pas que ça sorte. Il y a de ces semaines qui passent sans qu’il puisse y penser. Mais depuis maintenant quatre jours, quatre nuits… Il veille involontairement. Allumé par une tristesse sans borne, des crises, des cauchemars… Des visions, des hallucinations? Ce n’est pas le temps de craquer, se dit-il, mais craque-t-il vraiment?

Alors que son propre édifice s’écroule quand qu’il sache comment et pourquoi, ils reviennent.
Mais qu’est-ce que cet homme, pourtant droit et bien éduqué peut-il bien cacher dans son sillage?Découverte des plus macabres, des plus perturbantes… Des plus salvatrices?

Il passe de ces nuits où il la voit. Où il le voit. Mais que font-ils là? Qu’est-ce? Pour une autre fois dans sa vie, il a peur. Il les a vus se pencher tour à tour sur le berceau. Le regarder. Pétrification. Ne pas bouger, comme si le Ours vous fixait du regard, et profite d’un élan de faiblesse pour se lancer sur vous et vous rapiécer. Les questions surgissent, et ils ne sont pas seuls. La pression est énorme dans sa tête, l’amnésie des évènements passés se faisait de plus en plus fragile… Il n’en peut plus. Il veut savoir pourquoi ils le suivent. Au fond de lui, il le sait. Mais… Sa tête lui dit non, en lui donnant de violentes migraines.

Les perles de sang, ces larmes vermeilles, couleur vengeresse, qui coule et coule. Entend le bruit, entend le trouble… Saigne. Rivière qui coule du pavillon plus souvent qu’à son tour. Et il le vit mal. Il veut savoir, mais quand va-t-il s’en apercevoir? Ils se chargent de lui rappeler ses péchés. Ils veulent son bien, mais son esprit le prend mal. Le mal, grand mot souvent cité. Mais à la grandeur de celui-ci, l’on puisse deviner ce qui cloche n’est pas chose aisé. Longueur, recherche vaine. Sang qui s’échappe des veines?

Perturbant, est-ce. Mais de ses millions de secrets, ceux-là que Malagar veut déterrer, c’est sans doute le plus secret. Ses agissements reflètent cette recherche, son corps refuse. Choc trop grand à prévoir. Il les reconnait, de leur allure, de leurs yeux, de la façon dont ils le regardent. Il a su qui ils étaient. Mais pourquoi diable? Pourquoi tant de remords, de douleurs cachés dans ce corps pourtant d’allure si fort, si tenace?

L’esprit a ses limites. La réalité, aucune. Et ils se chargeront de lui rappeler qui il est.
Après tout… Ils en ont le droit, non? Il est le fruit d’une conception, ils en ont la responsabilité.
N’ira en paix que promesse tenue.
Génitrice sera la première étape.

{*squatte honteusement o,o*}

Le vide. Pas nécessairement inquiétant, pas forcément dangereux, ni même expansif. Juste un creux, sans fond, au milieu de sa poitrine. Là où le cœur battait, habituellement douloureusement et difficilement, se trouvait une impulsion régulière, saine, qui envoyait le précieux sérum dans les veines et les artères. Le corps fonctionnait comme à son habitude, le sang charriait l'oxygène apporté par les multiples alvéoles et les nutriments fournis par le système digestif jusqu'aux organes, qui s'abreuvaient et remplissaient leurs fonctions respectives. Le cerveau, parfait petit chef d'orchestre, surveillait cette activité grâce aux rapports fournis par le système nerveux, rectifiait, gérait. Une mécanique bien rodée, centenaire et plus. Abritant, à présent, une vie de plus à protéger, surveiller, gérer. Aucun problème là non plus, c'était naturel, le cerveau y était préparé. L'organisme aussi.

Alors quoi ? Était-ce l'influence de Lethis, Malagar, Appah - tous ceux-là réunis qui faisait vaciller l'esprit fragile ? Était-ce simplement naturel, les hormones qui provoquaient une humeur et l'inversaient ensuite ? Ou fallait-il penser que tout cela était sérieux, qu'il fallait s'en inquiéter ? Se couper des autres, peut-être. S'effacer, trouver de l'aide. Penser à elle ? Non. Un bête repli, de la lâcheté pure et dure. Échec.

Le vide avait aspiré manifestement quelques souvenirs de la soirée d'hier. Tout était flou. Pourtant, quand son esprit s'égarait sur Appah - et cela arrivait souvent aujourd'hui - elle éprouvait une certaine chaleur là où le vide s'était installé. La gêne était moins forte. Quelle étrangeté. Surtout quand on se réveille au milieu de la forêt, seule et trempée par la rosée du matin, la wadio cabossée à quelques mètres de là. Une bonne bosse à l'arrière de la tête accompagnée d'une douleur lancinante. Et les muscles complètement détendus. Et le silence.

Le reste du temps, elle s'abrutissait dans une tâche quelconque. Elle minait, principalement. Lentement, une résolution se formait, un nouvel état d'esprit, né du refus catégorique de la dérive vers la folie. Un sursaut. Un dernier élan. Et la chute. Son esprit dérivait, s'accrochait, lâchait prise. Au moins palpitait-il encore. Elle était seule face à ça, et le resterait. Coûte que coûte. Elle ne pouvait empêcher les autres de ressentir, elle ne pouvait se résoudre à les laisser. Alors elle endurerait en silence. Tous les Miliciens avaient déjà leur part de souffrance.

Flancherait-elle ? Assurément. Mais pas avant d'avoir aidé tous ceux qu'elle aimait.

Malagar. Lethis. Appah. Vidhar.

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